Lois et trans identité

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17 juin 2012 Delphine Transgenre MtF

lois et trans identité d’après http://delphine-pre.transexuelle.over-blog.com/article-lettre-ouverte-aux-deputes-et-aux-senateurs-50615218.html

et http://hudoc.echr.coe.int/sites/eng/pages/search.aspx#{%22dmdocnumber%22:[%22700202%22],%22itemid%22:[%22001-62326%22]}

et http://www.slate.fr/story/5395/les-transsexuels-francais-ne-sont-plus-des-malades-mentaux

Madame la Sénatrice, Monsieur le Sénateur,
Madame la Députée, Monsieur le Député,

Je me permets de contacter l’ensemble des élus de la République (Sénateurs et Députés), et cela en mon nom propre, pour aborder et vous présenter un sujet qui fait honte à notre République et à ses valeurs :  »Liberté, Égalité, Fraternité », valeurs que vous vous êtes engagés à défendre au travers de vos mandats.

Ce sujet concerne la transidentité et les personnes transidentitaires (aussi appelées transgenres).

Tout d’abord, pourquoi ces termes?
Tout simplement car nous vivons au XXIème siècle, et que les termes hérités du passé (transsexualité et transsexuel(le)s) sont largement dépassés au vu des connaissances actuelles concernant le genre (ou identité de genre) qui caractérise l’identité sexuée de tout individu vivant sur cette planète.

La transidentité n’est pas une maladie, et encore moins une maladie psychiatrique, notre Ministre de la Santé, Mme BACHELOT, l’a officiellement annoncé en février 2010 en retirant la transidentité des Affections de Longue Durée psychiatriques.

Malheureusement, certains médecins, psychiatres et chirurgiens aimeraient continuer à maintenir le couvercle médical et psychiatrique sur une population isolée et rejetée par la société.

Voici ce qui est écrit sur la page d’accueil du site internet de l’équipe parisienne valide en ce mois de mai 2010 (http://www.transsexualisme.info/):
« Le transsexualisme est une maladie authentique, qui est infiniment pénible pour la personne qui en est atteinte, et qui justifie donc une prise en charge médicale. »
et sur la page suivante intitulée  »vue d’ensemble »:
« En l’état actuel des connaissances, il s’agit d’un trouble psychique, … »

Ces écrits sont contraires aux décisions prises par Mme la Ministre elle-même.

Voici ce qu’écrit M. Thomas HAMMARBERG, Commissaire aux Droits de l’Homme du Conseil de l’Europe, dans son document thématique  »Droits de l’Homme et identité de genre » (que je vous fais parvenir en pièce jointe):
« La notion d’identité de genre permet de comprendre que le sexe avec lequel un enfant naît peut ne pas correspondre à l’identité de genre innée qu’il va cultiver en grandissant.
C’est l’expérience intime et personnelle profonde qu’a chaque personne de son genre, qu’elle corresponde ou non à son sexe de naissance, y compris la conscience personnelle du corps et les différentes formes d’expression du genre comme l’habillement, le discours et les manières. Dans la plupart des cas, l’identité de genre des personnes correspond à leur définition juridique (homme ou femme). En revanche, les personnes transgenres construisent une identité de genre qui ne correspond pas à leur définition juridique ; de ce fait, elles peuvent être amenées à vouloir changer de statut physique, social ou juridique – en partie ou en totalité – pour mettre en accord ce statut avec leur identité de genre. »

Je ne peux que vous conseiller la lecture détaillée de ce document.

La France sera-t-elle le pays de la Liberté ou celui de la discrimination d’une partie de sa population?

La France portera-t-elle le flambeau de l’Égalité ou restera-t-elle ce pays donneur de leçons qui ne pratique pas cette égalité chez elle?

Que demande la population transgenre? Tout simplement que les Droits de l’Homme soient appliqués dans notre pays, que notre pays respecte l’article premier de ces Droits. Elle ne demande pas plus de droits, mais les mêmes droits que tout Français peut légitimement attendre de la République.

Actuellement, un simulacre de démocratie est en cours au Ministère de la Santé. Un groupe de travail prévoit d’étudier la situation de la population  »transsexuelle », négligeant volontairement l’ensemble des personnes transgenres.

En février 2010, la Haute Autorité de Santé (HAS) a publié un rapport  »Situation actuelle et perspectives d’évolution de la prise en charge médicale du transsexualisme en France ».

Ce rapport aborde convenablement la situation actuelle et les dérives présentes autant dans les  »équipes dites officielles » que dans la situation juridique de la population transgenre.

A la lecture détaillée de ce rapport, il est d’abord flagrant que la HAS continue d’ignorer, ou du moins rejeter dans un futur lointain ceux qu’elle appelle les transgenres ainsi que les jeunes transgenres prébubères (voir page 175), savez-vous que 34% des jeunes transgenres ont fait au moins une tentative de suicide?

Ensuite ce rapport conserve exactement le même modèle de soins que celui existant actuellement,  »modèle » qui n’a aucune base officielle. Modèle largement rejeté par les personnes les plus concernées: les transgenres eux-mêmes!

Le Ministère de la Santé, via le groupe de travail mis en place, ne désire que rendre officiel ce rapport et le système archaïque et discriminant existant actuellement.

De plus, il ne désire absolument pas que soit pris en compte l’aspect juridique de la situation des transgenres, ne voulant aucune passerelle entre ce groupe de travail et le Ministère de la Justice.
Il vous faut savoir que de nombreuses transgenres vivent dans notre pays avec des papiers qui ne sont pas en règle, ceci entrainant des discriminations à l’embauche, des discriminations dans leurs déplacements (certains pays leur sont interdits) … , discriminations poussant certains transgenres dans la prostitution et l’illégalité.

Il est important de savoir que le Ministère envisage de remettre en service une circulaire ministérielle datant de 1989, circulaire déclarée illégale par la Cour de Cassation en janvier 2004!

La SEULE solution à tous ces problèmes (et encore je ne vous ai décrit qu’une toute petite partie immergée de l’iceberg), serait que la France applique les recommandations de M. Thomas HAMMARBERG, dans le respect des revendications de la population transgenre, recommandations que je vous liste ci-après:

Recommandations aux États membres du Conseil de l’Europe

Les États membres du Conseil de l’Europe devraient :

  1. Mettre en œuvre les normes internationales des droits de l’homme sans distinction et interdire expressément la discrimination fondée sur l’identité de genre dans la législation nationale antidiscrimination. Cette mise en œuvre au niveau national devrait s’inspirer des principes de Yogyakarta sur l’application de la législation internationale des droits humains en matière d’orientation sexuelle et d’identité de genre ;
  2. Adopter une législation relative aux infractions motivées par la haine offrant une protection spécifique aux personnes transgenres contre les infractions et les incidents inspirés par la transphobie ;
  3. Instaurer des procédures rapides et transparentes de changement de nom et de sexe sur les extraits d’acte de naissance, cartes d’identité, passeports, diplômes et autres documents officiels ;
  4. Dans les textes encadrant le processus de changement de nom et de sexe, cesser de subordonner la reconnaissance de l’identité de genre d’une personne à une obligation légale de stérilisation et de soumission à d’autres traitements médicaux;
  5. Rendre les procédures de conversion de genre, telles que le traitement hormonal, la chirurgie et le soutien psychologique, accessibles aux personnes transgenres et en garantir le remboursement par le régime public d’assurance maladie ;
  6. Supprimer les dispositions portant atteinte au droit des personnes transgenres à demeurer mariées à la suite d’un changement de genre reconnu ;
  7. Élaborer et mettre en œuvre des politiques de lutte contre la discrimination et l’exclusion auxquelles font face les personnes transgenres sur le marché du travail, dans l’éducation et dans le système de santé ;
  8. Consulter les personnes transgenres et leurs organisations et les associer à l’élaboration et à la mise en oeuvre de politiques et de dispositions juridiques les concernant ;
  9. Promouvoir les droits humains des personnes transgenres et lutter contre la discrimination fondée sur l’identité de genre au moyen de l’éducation aux droits de l’homme, de programmes de formation et de campagnes de sensibilisation ;
  10. Dispenser aux professionnels de santé, notamment aux psychologues, psychiatres et médecins généralistes, une formation sur les besoins et les droits des personnes transgenres et l’obligation de respecter leur dignité ;
  11. Intégrer les questions relatives aux droits humains des personnes transgenres dans les activités des organes de promotion de l’égalité et des structures nationales des droits de l’homme ;
  12. Développer des projets de recherche pour recueillir et analyser des données sur la situation des personnes transgenres au regard des droits de l’homme, y compris sur les problèmes de discrimination et d’intolérance, et ce sans porter atteinte au droit au respect de la vie privée des personnes concernées.

Voici quelques commentaires à ces recommandations:

  1. Points 1 et 2: La HALDE (et la législation française) ne reconnaît pas les discriminations transphobes, seuls sont reconnus les actes relatifs à l’orientation sexuelle. Or la transidentité n’a aucun rapport avec l’orientation sexuelle!
  2. Points 3 et 4: Actuellement les changements d’état civil dépendent du bon vouloir des juges, qui s’appuient sur deux arrêts de la Cour de Cassation du 11 décembre 1992. La stérilisation est obligatoire (ce qui est un comble dans le Pays des Droits de l’Homme), des expertises humiliantes peuvent être ordonnées, … . Il s’écoule de nombreuses années entre le moment où la personne transgenre vit dans son genre et le moment où elle peut, enfin!, obtenir ses papiers en règle. Vous imaginez-vous obligé de dévoiler votre vie privée, et la plus privée qu’il soit, dans tous les actes de la vie quotidienne?
  3. Point 5: rendre accessible, ne veut pas dire obligatoire! Ce qui est inévitable au vu des entraves aux changement d’état civil.
  4. Point 6: Encore un non respect des Droits de l’Homme. Un transgenre marié avant d’effectuer son changement de genre est dans l’obligation de divorcer s’il veut obtenir des papiers d’identité conformes à sa réalité, même si aucun des deux partenaires ne le désire.
  5. Point 10: cela semble tellement évident! Et pourtant, l’information juste n’est absolument pas diffusée. Quelques membres du corps médical se sont auto proclamés « experts en transsexualisme » et monopolisent l’accès à une information fausse de manière à protéger leurs intérêts personnels.

Nulle part il n’est recommandé la création de  »centres de référence » pour les traitements que le Ministère de la Santé désire mettre en place.

Peut être envisagé la création d’une agence, du même type que l’AFSSA, qui pourrait collecter de façon anonyme les données à travers le monde pour améliorer la prise en charge médico-chirurgicale des personnes transgenres qui désireraient des traitements médicaux et/ou chirurgicaux, afin d’apporter aux médecins libéraux l’information juste et actualisée, ainsi que des données sur des interactions médicamenteuses et/ou des co infections (VIH, Diabète … ).

Les personnes transgenres souhaitent vivre sur un pied d’égalité avec l’ensemble de la population française, que leurs revendications soient enfin prises en compte, et pour cela la Nation, via ses Élus, doit faire preuve d’un courage d’affronter la réalité: en son sein vit une population rejetée qui ne demande que la stricte application des Droits de l’Homme.

Pour finir, je désire toucher l’être humain qui est en vous.

Un proche, un de vos enfants, un de vos petits enfants est peut-être une personne transgenre qui souffre de discrimination, qui n’ose affronter ce qu’il vit, qui vivra avec cette souffrance jusqu’au jour où le choix ne sera plus possible au risque de choisir la plus mauvaise solution de fuite, que feriez-vous face à cette situation? Le rejetteriez-vous? Votre amour irait-il jusqu’à le renier? Ou l’aideriez-vous à s’accepter et à vivre?

Et pour l’aider, accepteriez-vous de vous pencher sur sa situation telle qu’elle est prévue par le Ministère de la Santé: celle d’une vie considéré comme malade, rejeté par la société qui lui refusera une identité conforme à son genre, le laissant dans un monde entre deux sans reconnaissance juridique?

Je suis à votre disposition si vous désirez des renseignements complémentaires.

Vous remerciant d’avance pour le cœur que vous mettrez à mettre en place une reconnaissance législative de la discrimination liée au genre et ses conséquences, je vous prie d’agréer, Madame la Sénatrice, Monsieur le Sénateur, l’expression de mes sentiments respectueux,

COUR (PLÉNIÈRE)

AFFAIRE B. c. FRANCE

COUR (PLÉNIÈRE)
AFFAIRE B. c. FRANCE
(Requête no13343/87)
COUR (PLÉNIÈRE)
AFFAIRE B. c. FRANCE
COUR (PLÉNIÈRE)AFFAIRE B. c. FRANCE

(Requête no13343/87)

«L’histoire du désir de changement de sexe dans le droit humain est au moins aussi vieille qu’Hérodote, qui en faisait le mal de Scythie. Mais ce n’est que depuis trente ans que le transsexualisme a abandonné le domaine du rêve pour devenir réalité réalisable, grâce aux « progrès » de la médecine. La découverte et l’utilisation des hormones sexuelles, l’avènement d’une chirurgie plastique et prothétique, ont permis de donner à l’homme ou à la femme la morphologie corporelle du sexe opposé.» slute magazine